Une référence mondiale en sciences de la mer

L’histoire de l’océanographie à Rimouski prend son envol au début des années 1970. Dès la création de l’Université du Québec à Rimouski (UQAR), la mission de formation et de recherche en océanographie est inscrite dans les lettres patentes de l’UQAR. Sous le leadership de Pascal Parent et d’Alcide C. Horth, le ministre de l’Éducation de l’époque, François Cloutier, autorise l’UQAR à offrir un programme de maîtrise en océanographie. 

En 1972, l’Institut national de la recherche scientifique crée l’INRS-Océanologie qui deviendra un partenaire de l’UQAR dans le développement de l’océanographie à Rimouski. À partir de 1973, les travaux de recherche et la formation en océanographie s’enclenchent et s’accroissent rapidement. Dès lors, les besoins en infrastructures se font sentir afin de répondre adéquatement aux nombreux étudiants inscrits à la maîtrise et, à partir de 1982, au doctorat. 

En 1979, l’INRS-Océanologie installe un laboratoire humide dans l’ancienne gare maritime sur le quai de Pointe-au-Père pour des travaux de culture de phytoplancton et de zooplancton. En 1990, ce laboratoire humide est remplacé par la station aquicole de Pointe-au-Père qui devient un important maillon pour les travaux de recherche en écotoxicologie et en pisciculture. Les programmes de recherche se diversifiant, les besoins pour un navire de recherche sont de plus en plus urgents. En 1988, l’UQAR fait l’acquisition de son premier navire de recherche, l’Alcide C. Horth, bien équipé pour des travaux dans l’estuaire du Saint-Laurent et le fjord du Saguenay.

Au cours de cette période, la recherche océanographique au Québec est en plein essor. Le Groupe interuniversitaire de recherche en océanographie du Québec (GIROQ) est créé en 1970. Rapidement, les chercheurs de Rimouski participent à cette effervescence et établissent les premières collaborations en matière de programmation de recherche et de partage des infrastructures. En 1990, les chercheurs du Département d’océanographie de l’UQAR et de l’INRS-Océanologie se regroupent au sein du Centre océanographique de Rimouski (COR), ce qui permet d’harmoniser les programmations scientifiques et d’accroître les activités conjointes de recherche.

La création du Groupe de recherche en environnement côtier (GREC) en 1994 a été un des éléments déterminants dans la mise en place de l’Institut des sciences de la mer de Rimouski (ISMER). Le GREC se démarquait par son caractère pluridisciplinaire, ce qui a permis aux chercheurs d’élaborer une programmation de recherche diversifiée et intégrée, en plus d’offrir aux étudiants un accès à une expertise qui n’avait d’égale que celle des plus grands centres de recherche nord-américains. Dès lors, les bases pour la création de l’ISMER sont posées et c’est en 1997 qu’est mis sur pied un groupe de travail pour la création d’un institut de recherche et de formation universitaire en sciences de la mer à Rimouski.

En août 1997, le groupe de travail dépose son rapport : il propose de regrouper les expertises de recherche et de formation en sciences de la mer de l’UQAR et de l’INRS et de mettre sur pied un institut de recherche et de formation doté d’une programmation de recherche dans les quatre disciplines de base de l’océanographie. En outre, le rapport souligne l’importance d’établir un pôle d’attraction pour les étudiants en offrant un milieu de formation stimulant, de valoriser les travaux de recherche réalisés par les membres de l’institut et de favoriser le financement, la promotion ainsi que la diffusion des résultats auprès de la communauté scientifique et du public en général. L’ISMER est créée officiellement le 1er mars 1999. 

Au cours des vingt dernières années, l’ISMER a grandi. Comptant 16 postes de professeurs lors de son inauguration en 1999, l’Institut emploie aujourd’hui 23 professeurs, en plus de 45 professeurs associés. Au cours de ces années, l’Institut a obtenu trois chaires de recherche du Canada, une chaire de l’UNESO et une chaire en partenariat avec le ministère des Pêches et des Océans en acoustique marine. De plus, il a accueilli des regroupements stratégiques du FRQNT comme le RAQ, Québec Océan et GEOTOP. Plusieurs de ses chercheurs participent aux centres d’excellence de recherche ArcticNet et MEOPAR. Par ailleurs, forts de leur positionnement et soucieux de contribuer au renforcement de la collaboration entre les joueurs du secteur, l’UQAR et son institut mettent en œuvre le Réseau Québec maritime (RQM), dont la mission est de fédérer et d’animer les forces vives en recherche et en innovation dans les différents domaines liés au secteur maritime. Le RQM assure la cogestion de l’Institut France-Québec pour la coopération scientifique en appui au secteur maritime.

(Photo : Jean-Claude Brêthes)Les travaux de recherche de l’ISMER sont arrimés aux grands enjeux reliés aux effets des changements climatiques et aux modifications de la productivité des écosystèmes causées par les activités anthropiques. L’ISMER a également fait de la valorisation des bioressources une de ses thématiques de recherche. L’Institut s’intéresse à l’étude d’espèces adéquates et performantes, poissons et invertébrés, pour des élevages intensifs, et ces travaux profitent des installations de la station aquicole de Pointe-au-Père. Par ailleurs, d’importantes missions océanographiques sont réalisées dans le Saint-Laurent et même dans l’Atlantique Sud au large des côtes argentines. Ainsi, des travaux ont été réalisés dans l’Arctique canadien sur les bateaux de la Garde côtière canadienne Pierre Radisson et Amundsen, mais aussi en Antarctique sur le Sedna IV et ailleurs dans le monde. Les recherches des professeurs sont reconnues à travers le monde et suscitent régulièrement des médias. À l’échelle internationale, les chercheurs de l’ISMER ont établi des collaborations durables avec différentes institutions universitaires à travers le monde, notamment en Argentine, au Mexique, en France et en Chine.

Parallèlement au développement de l’ISMER, la région rimouskoise se développe aux couleurs de la mer et on assiste à la mise en place de la Technopole maritime du Québec (TMQ), du Centre de recherche sur les biotechnologies marines (CRBM), du Centre interdisciplinaire de développement en cartographie des océans (CIDCO), d’Innovation maritime et de l’Observatoire global du Saint-Laurent (OGSL). L’ISMER est intimement associé à la création de ces centres de recherche satellites qui ont pour buts de répondre aux besoins de l’industrie et de faire du secteur des sciences de la mer un rouage important pour le développement socioéconomique de la région bas-laurentienne basée sur une économie du savoir.

Pour soutenir son développement, l’Institut a mis à la disposition de ses professeurs et de ses partenaires du secteur maritime de nombreux outils de recherche à la fine pointe de la technologie. Ainsi, dès la première année, l’UQAR a fait l’acquisition du Coriolis II grâce une subvention de la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI). D’autres importantes subventions de la FCI et de Développement économique Canada totalisant près de 26 millions de dollars ont permis, entre autres, d’agrandir la station de recherche de Pointe-au-Père, de remplacer le réservoir d’eau, de relocaliser la prise d’eau et de construire le laboratoire d’écotoxicologie pour des travaux en radio-marquage. De nombreux autres équipements ont été acquis grâce à ces financements. Une bonne partie de ces équipements se retrouve dans le Centre d’appui à l’innovation par la recherche (CAIR) qui a été créé pour favoriser les transferts technologiques aux organisations et aux entreprises.

Sur le plan du financement de la recherche, l’ISMER s’est également distingué en quadruplant les subventions et commandites pour la recherche et le développement, atteignant 4,8 M$ en 2018-2019, et ce, sans comptabiliser le financement dédié aux infrastructures. En 20 ans d’existence, l’ISMER a obtenu 100 M$ en subventions et contrats. À cette réussite s’ajoute l’obtention d’une subvention de 15 M$ sur 5 ans pour le programme de recherche Odyssée Saint-Laurent. En outre, la proportion de chercheuses et de chercheurs de l’UQAR dont les travaux touchent aux sciences de la mer a augmenté avec les années. Globalement, 33 % de l’effectif professoral de l’UQAR œuvre dans les domaines de sciences naturelles et génie et de sciences humaines reliés au grand secteur maritime.

Sur le plan de la formation, l’ISMER a diplômé plus de 273 étudiants à la maîtrise, 108 étudiants au doctorat et 5 étudiants au diplôme supérieur spécialisé (DESS). Au total, si nous additionnons tous les diplômés depuis la création de l’UQAR, c’est 457 étudiants à la maîtrise, 134 étudiants au doctorat et 5 étudiants au DESS qui ont été formés à Rimouski en sciences de la mer au cours des 50 dernières années.

Ces réalisations s’appuient sur la reconnaissance nationale et internationale des compétences du corps professoral et la qualité de la formation du personnel hautement qualifié. Sur ces bases solides et leur leadership affirmé, l’UQAR et son institut poursuivent leurs actions de développement avec engagement et innovation. Les perspectives de développement et de rayonnement de l’UQAR dans le domaine des sciences de la mer sont excellentes.

Serge Demers a été directeur de l’ISMER de 1999 à 2014.

Ariane Plourde est directrice de l’ISMER depuis 2014.

 

Plusieurs sections de cet article sont tirées du texte de S. Demers et d’E. Pelletier, « Les sciences de la mer », dans P. Doray, E.-L. Dussault, Y. Rousseau et L. Sauvageau (dir.), L’Université du Québec, 1968-2018, 50 ans de contributions éducatives et scientifiques au développement du Québec, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2018, p. 491-511.

 
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